Après avoir rencontré leurs “voisins” du quartier sur le marché de la Reynerie, les étudiants de l’Université du Mirail commencent à réfléchir à d’autres manières de se retrouver. La question de la fraternité entre tous se pose, après avoir constaté l’existence de problématiques communes entre la jeunesse étudiante et celle du quartier (considérée par eux mêmes comme une seule jeunesse) : les précarités, les difficultés à se loger,etc. La question posée aujourd’hui est donc “Que faire ?” Des pistes de réflexion s’amorcent, du côté des habitants avec les réunions d’habitants organisées le dernier vendredi de chaque mois et du côté des étudiants.
Il est ressorti des réunions d’habitants une volonté de refuser la stigmatisation du “31100”. “Chez beaucoup de jeunes, cela créé de la révolte, de l’incompréhension. C’est vécu comme une provocation d’être contrôlé plusieurs fois par jour ou par semaine, uniquement parce qu’on habite Reynerie ou Bellefontaine. Ces pratiques doivent cesser : il n’y a pas de séparation des gens à faire : nous sommes de la même ville, du même pays”(Gens de Reynerie solidaires). En ce qui concerne les liens qui se tissent entre habitants et étudiants, “comment permettre à des gens qui ne devaient pas se rencontrer de pouvoir le faire ?’Il ne peut s’agir que d’une démarche volontaire et en aucun cas l’addition des luttes ne fonctionne. Du côté des étudiants, il apparaît que des liens se sont d’abord tissés au cours des grèves avec les enseignants et les personnels de l’Université. La démarche de venir sur le marché résulte d’abord de l’idée de déplacer la centralité politique du centre-ville vers les quartiers. De plus, de nombreux étudiants sont aussi des habitants de Reynerie ou Bellefontaine, certains viennent faire de l’alphabétisation à TO7, du soutien scolaire à Voir et Comprendre. La nouveauté de la démarche réside dans son caractère organisé et collectif, la volonté de construire sur la durée des projets communs dans les deux sens, en ouvrant l’Université à des non-étudiants autour de moments d’expression libre.
En un temps où la volonté est de détruire l’éducation et la santé pour des critères de rentabilité, où la question y compris de la disparition des UFR de lettres semble posée, les négociations entre les syndicats et l’Etat n’apparaissent pas crédibles et d’autres formes de rencontres sont à réfléchir. La réflexion collective sur la vie en société s’inscrit dans le contexte des luttes contre les réformes. Toutefois, les étudiants et les habitants s’accordent sur l’idée qu’on entre dans une période politiquement inédite et que les nouvelles formes de la fraternité restent encore à imaginer ensemble.