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Edito : Malaise dans la civilisation ?

Article proposé le mercredi 5 mars 2008, par Jean-Pierre Nizet


Le terme brumeux de civilisation fait ces derniers temps une percée dans les discours. Si nous lui préférons le mot plus modeste et plus accessible de citoyenneté, essayons cependant d’y voir un peu plus clair avec trois penseurs qui ont creusé la notion de civilisation.

Quand Sigmund Freud écrit en 1929 « Malaise dans la civilisation », il entend parler de refoulement généralisé et d’excès de répression sexuelle. Aujourd’hui, les psychanalystes évoquent à leur tour « un malaise » mais cette fois pour nommer et dénoncer la recherche par tous les moyens de la jouissance.

Malaise parce que la prétention à la satisfaction de tous nos désirs et la montée en puissance de la revendication du droit de chacun à sa plénitude, à son pur accomplissement, conduisent inévitablement à l’exclusion de l’autre. Lorsque l’on ne s’autorise que soi-même, l’autre se réduit très vite à un obstacle, une menace.

Quand Norbert Elias reprend les travaux de Freud, il reconnaît dans la domestication des pulsions par des cadres normatifs un processus de civilisation.

Aujourd’hui, le malaise se renforce car nous décelons dans le démantèlement du code du travail, l’érosion de la protection sociale, l’hyperfinance qui tue l’économie réelle, des processus de dérégulation.

Avec le scandale de la Société Générale qui se greffe sur la crise des « Subprimes », nous avons découvert la faillite morale du capitalisme financier et l’irresponsabilité totale de prétendus spécialistes. Fraude massive, gestion opaque, absence de contrôles, délit d’initié, sans parler des circuits de blanchiment d’argent dans l’Affaire du Sentier. Le gouverneur de la banque de France peut conclure : « c’est comme ça, c’est pas de chance, c’est la vie. ».

Quand Edgar Morin invoque une politique de civilisation, il désire une politique qui soit en mesure de restaurer les solidarités et les responsabilités. Une politique en mesure de combattre la recherche du profit aux dépens d’autrui. Une politique qui ne reste pas indifférente au sort de ceux qui ne travaillent pas ou de ceux qui travaillent dans des conditions indignes. Le malaise s’explique ici par la banalisation de discours obscènes à l’encontre des précaires, des chômeurs et des immigrés, rendus coupables de tous les maux.

Alors malaise dans la civilisation ? Oui mais ne cédons pas à la déploration. Au-delà des forces qui nous séparent les uns des autres, au-delà des murs et des grilles que nous érigeons (voir notre dossier), au-delà des écrans et des miroirs qui nous paralysent, au-delà de nos peurs, nous continueront de croire en l’homme en tant que sujet collectif. Nous affirmons même que la grandeur de l’homme réside dans sa capacité d’entendre la détresse humaine et d’y répondre. La prééminence de l’autre en tant qu’il est un autre, voilà ce qui fonde à nos yeux la civilisation.

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